(discours d'Anne-Marie Peysson, présidente de l'ALCIP, devan la commission des affaires sociales du Grand-Conseil le 21 février)
La situation est grave, même critique. Et si l’on ne réagit pas rapidement, on court vers une catastrophe sociale et économique dont on aura beaucoup de peine à se relever.
Aujourd’hui, il est très facile de tomber à l’aide sociale mais bien plus difficile d’en sortir. A vrai dire, tout est fait d’ailleurs pour y rentrer.
En effet, ce n’est pas seulement l’aide sociale qui ne fonctionne pas bien, mais aussi d’autres institutions, comme l’OCE, le SCARPA, et les PC familles.
Je vous livre ici deux exemples concrets :
Une jeune maman de 31 ans en instance de divorce. A la suite d’une crise d’adolescence, elle abandonne ses études et travaille comme caissière à la Migros pendant 10 ans. Le divorce se passe mal et la pension alimentaire n’est pas toujours payée. Elle bénéficie des PC-familles qui lui déduise la pension alimentaire ainsi qu’un revenu fictif de 600.- par mois. Les PC-familles ne tiennent pas comptent des pensions alimentaires non-payées car elle doit faire les démarches auprès du SCARPA pour les récupérer. Là c’est déjà le parcours du combattant car le SCARPA lui dit qu’ils entrent en matière que s’il y a 3 mois consécutifs de pensions non-payées. Comme Monsieur paye un mois sur deux les démarches sont longues et pénibles entre le tribunal et les nombreux documents qu’on lui demande. Les mois passent et un jour, les PC-familles demandent le renouvellement du dossier en demandant une tonne de documents qu’elle arrive à fournir dans les temps. Puis, quelques jours plus tard, elle reçoit une lettre des PC-familles lui disant que comme elle ne veut pas fournir certains documents, elle ne recevra plus ces prestations. Il se trouve que c’est moi qui l’ai aidée à monter son dossier et que c’est encore moi qui l’ai envoyé par la poste. J’ai donc téléphoné au gestionnaire de son dossier et là on m’a répondu que c’était possible qu’ils ne soient pas parvenus jusqu’à son bureau car les documents passent en premier par un autre service. Puis, après insistance, le gestionnaire m’annonce qu’il a trouvé les documents. Je vous laisse imaginer ce qui se serait passé pour cette personne si je n’avais pas été là, en tant que présidente d’une association, pour faire taire la mauvaise foi de cette personne qui dans un premier temps, s’est évertuée à me dire que Madame ne voulait pas fournir ces documents.
Ensuite, par deux fois, elle a reçu un courrier lui demandant de rembourser un trop perçu de 4000.- sans aucune explication, mais avec menace de ne plus la prendre en charge si elle ne remboursait pas. Puis silence pendant plusieurs mois et rebelote et enfin plus rien.
Avec tout ce stress accumulé, cette maman a commencé à faire des erreurs de caisse et à manquer pour cause de maladie et en a perdu son travail.
Elle s’est inscrite au chômage avec l’intention de trouver une formation dans l’administratif et de retrouver un emploi. Alors qu’elle maîtrise très bien le français et a déjà eu quelques expériences en bénévoles dans l’administration, on lui répond que comme elle est vendeuse, elle doit continuer à rechercher un travail dans ce domaine. Elle a eu beau dire qu’en élevant seule ses deux enfants, les horaires de vente étaient difficilement compatibles et qu’elle ne supportait plus ce métier, rien à faire. En revanche, elle a dès le départ, été sanctionnée de 5 jours d’indemnités pour s’être trompée de formulaire de recherche d’emploi. Elle a suivi des cours d’anglais et d’informatique qu’elle a demandé et dont le cours d’informatique lui a été refusé et qu’elle a payé par le chèque emploi-formation et a même trouvé d’elle-même, deux emplois temporaires dans des postes administratifs qui ont donné entière satisfaction aux entreprises.
Un jour, arrivée presque à la fin de son chômage, elle se trompe de date pour un rendez-vous avec sa conseillère en emploi et est sanctionnée à nouveau et se retrouve avec 1000.- de moins. Nous avons fait recours il y a 3 mois et aucune réponse n’a été donnée à ce jour, sinon qu’on allait lui répondre mais que ça prenait du temps.
Entre-temps, complètement découragée et dans un état de stress permanent quant à ses factures qui s’accumulent, elle s’est inscrite à l’aide sociale où on lui a répondu qu’elle devait être prise en charge entièrement pendant quelques temps par les PC-familles qui actuellement sont en train de refaire le calcul et pendant ce temps, elle vit avec 1500.- des PC-familles et 800.- de pensions alimentaires avec un loyer de 1400.-
Autre cas (plus court celui-là) : un monsieur de près de 60 ans, ancien ingénieur en informatique mais qui n’a plus travaillé depuis 2007. Le domaine de l’informatique est en constante évolution mais monsieur est d’après son assistante sociale, un bon candidat pour le SRP et en même temps, elle lui dit ceci : bon, vous et moi on sait très bien que vous avez peu de chance de retrouver un travail, mais svp, jouez le jeu. Donc, plusieurs mois d’une formation informatique très spécialisée et très couteuse et au final, monsieur retourne au CAS et prends patience en attendant la retraite. Il a bien réussi la formation, mais nous a dit qu’elle était obsolète sur le marché du travail, que lui le savait, l’avait dit, mais que visiblement, l’important, c’était que son AS puisse montrer à ses supérieurs qu’elle s’est bien occupée de monsieur.
De ces deux exemples, et d’autres situations vécues à l’Hospice Général, nous proposons que :
L’aide sociale soit totalement repensée (sa politique est obsolète et plus en adéquation avec la réalité du terrain) : suppression du CASI, augmentation de l’entretien de base permettant de vivre décemment pour pouvoir être déchargé de tout autre soucis que celui de retrouver un emploi. Tant à l’aide sociale qu’au niveau de l’OCE, une politique plus souple, moins psychorigide qui permette de pouvoir changer de métier, d’avoir accès à une vraie formation et un plus grand respect de la personne en ne la sanctionnant pas à tout va, pour la moindre petite erreur. Une refonte totale des PC-familles ainsi que du SCARPA. Pour les personnes de plus de 55 ans, voire 58 ans (à réfléchir), la création de rentes-pont, afin de désengorger l’aide sociale, mais qui ne serait pas irréversible. Dans toutes les institutions qui sont en contact avec des situations de précarisation, telles que l’OCE, les PC-familles entre autres, une plus grande humanité (nous entendons trop souvent ces employés nous dire qu’ils ne sont pas assistants sociaux et que ce n’est pas leur problème quand on leur explique pourquoi telle personne n’a pas pu encore fournir tel document et qu’on demande un délai). Quant à l’Hospice Général, une plus grande écoute et compréhension des problèmes psy liés à la précarité et à la santé, notamment pour les personnes en attente d’une décision AI qui ont souvent plus de peine que d’autres à apporter les documents dans les temps.
Enfin, concernant en amont la politique de l’emploi : un plus grand soutien aux petites et moyennes entreprises, en faciliter la création, avoir des emplois plus en adéquation avec les compétences locales, favoriser la formation en emploi, les services à la petite enfance, l’aide à domicile et aux personnes âgées etc. et enfin, concernant les MMT, nous ne trouvons pas normal qu’une personne à l’aide sociale, ne soit payée que 50.- de plus par moi, il s’agit ni plus ni moins qu’une forme d’exploitation qui n’est pas acceptable en terme de respect de la dignité de la personne.
Je termine en vous disant ceci : il est important de réaliser qu’un investissement financier et un changement des mentalités sont urgemment nécessaires. Il faut offrir à ces personnes en situation de précarité, une politique qui ne soit plus basée sur des règlements incitatifs, mais qui doit mettre en places des mesures encourageantes et non infantilisantes comme c’est devenu le cas aujourd’hui. C’est par une politique beaucoup respectueuse de la personne qu’on leur redonnera espoir.
Et enfin, certains nous diront que l’Etat n’a plus d’argent. Il est vrai que je connais assez peu les problèmes liés à l’exil fiscal si on prenait plus l’argent là où il se trouve. Mais je peux vous dire, que l’exil social coutera certainement bien plus cher à notre économie si on n’investit pas maintenant et en ne prenant que des mesurettes. Car enfin, les exilés fiscaux, eux, une fois partis, s’ils ne rapportent plus d’argent, ne seront pas non plus à charge de la société, en revanche, les exilés sociaux, restent sur Genève, vont en s’augmentant et seront toujours plus à charge de la société. Si on investit dans une politique sociale et de l’emploi en s’en donnant vraiment les moyens, c’est une amélioration du pouvoir d’achat, des gens qui iront moins faire leur course en France, des couts de la santé moindre, et enfin, l’envie aux citoyens de notre canton, de s’investir pour une société qui leur aura accordé le respect et la confiance qu’ils méritent de recevoir pour eux et pour leurs enfants.
Commentaires :
sociale
Bonjour je suis dans le mème cas licencié en 2014 deux ans de chomage sans rien trouvé et pour le moment je ne peut mème pas aller au social car du a mon licenciement j'ai reçu une prime et le social me dit il faut vivre avec mes économies mais la j'arrive a la fin alors bientôt je n'aurais pas le choix que d'aller au social.C'est vraiment une période difficile et j'ai 58 ans.J'espère qu'il me feront pas des misères le jour venu quand pensez vous.Merci Salutations
Christian Currat